L'aménagement de la classe
La rentrée est à nos portes, les enseignants se remettent peu à peu en mode “école” et les médias sociaux regorgent de partages concernant la décoration et l’organisation de la classe. C’est normal : chaque année devient pour les enseignants une occasion de recommencer en neuf, d’instaurer de nouvelles pratiques ou encore de revoir le coin lecture. À ce propos, on entend toutes sortes de choses concernant l’aménagement de la classe. Mais qu’en est-il vraiment ? Que sait-on sur l’impact de l’environnement scolaire sur l’apprentissage et le mieux-être à l’école ?
Pour tenter de répondre à ces questions, je vous propose un résumé complet d’un article concernant les impacts des différentes caractéristiques de la classe sur les élèves ainsi que des pistes concernant l’enseignement flexible.
Bonne lecture et bonne rentrée à tous !
Article en vedette :
“The impact of classroom design on pupils' learning: Final results of a holistic, multi-level analysis”
Il est plutôt facile de mesurer l’impact de la lumière ou de la qualité de l’air dans un milieu contrôlé. Par exemple, on pourrait demander à des sujets de réaliser la même tâche dans une pièce fortement éclairée et dans une pièce faiblement éclairée, puis comparer les résultats pour en déduire que la lumière a un impact sur l’accomplissement de la tâche. Par contre, il devient beaucoup plus complexe de mesurer ces mêmes facteurs dans un environnement moins contrôlé, une école par exemple. Étonnamment, il existe peu de recherches sur l’environnement de la classe dans une perspective holistique. L’étude que je vous résume aujourd’hui est particulièrement intéressante car elle se penche aux facteurs environnementaux dans leur ensemble et s’est réalisée dans des classes réelles pendant toute une année scolaire.
En effet, des chercheurs de l’Université de Salford, au Royaume-Uni, ont étudié l’environnement de 3 766 élèves, soit 153 classes dans 27 écoles primaires différentes, allant d'une petite école de village jusqu’à de plus grandes écoles en milieu urbain.
Cette étude s’est intéressée à trois grands facteurs et à leurs impacts sur les résultats scolaires des élèves : les facteurs naturels de l’environnement, la personnalisation de l’environnement et la stimulation de l’environnement.
Les facteurs naturels font référence à la lumière, à la qualité de l’air et à la température. La personnalisation quant à elle, signifie l’appropriation de la classe par les élèves ainsi que la flexibilité de l’environnement. Enfin, les chercheurs ont aussi mesuré la stimulation de l’environnement en s’intéressant aux couleurs présentes dans la classe et à la complexité de l’environnement visuel.
Il y ont fait plusieurs découvertes intéressantes. Tout d’abord, ils ont constaté que plus les élèves étaient performants, moins l’environnement avait un impact sur leur progression. C’est donc dire que l’environnement devient une question d’équité entre les élèves.
Les facteurs naturels, particulièrement la lumière, sont ceux qui ont le plus grand impact sur l’apprentissage. Les classes dans lesquelles il est possible de contrôler la lumière, la température ou même la qualité de l’air seraient aussi préférable.
Ensuite, il semble que les classes où les élèves ont la liberté d’afficher leur travaux, des photos ou encore des créations artistiques renforcent le sentiment d’appartenance, ce qui aurait ensuite un impact sur la réussite scolaire. Cela semble également avoir un impact important sur le bien-être à l’école des élèves.
Par ailleurs, les classes qui ont une caractéristique architecturale distincte ( en forme de L ou de T, des étagères intégrées, un plafond différent, etc.) renforcent également le sentiment d’appartenance. Ici, je ne peux pas m’empêcher de penser aux fameuses mezzanines d’Yves Nadon !
En ce qui concerne le niveau de décoration, les chercheurs ont trouvé que seule une classe modérément décorée a un impact positif sur la performance des élèves. C’est à dire, que les classes devraient être un endroit stimulant et inspirant mais qui demeure ordonné et pas trop surchargé. Enfin, les couleurs éclatantes ou très intenses devraient être limitées à des accents seulement plutôt que d’être la couleur principale de la classe.
Les chercheurs estiment que l’environnement représente 16% de l’ensemble des facteurs influençant la performance scolaire des élèves.
Qu’est-ce qu’on peut en retirer pour nos classes ?
On porte une attention particulière à la lumière et on s’assure de pouvoir la moduler si possible (en ajoutant des lampes sur pied par exemple).
On laisse à nos élèves du contrôle sur leur environnement en leur permettant de participer au choix des affichages.
On s’assure de ne pas surcharger visuellement la classe sans toutefois en faire un endroit peu stimulant.
Si on est fan des couleurs éclatantes, on se limite à des accents afin d’éviter la surcharge visuelle.
Malheureusement, il n’existe pas à ma connaissance de telle étude réalisée au Québec. Les différences climatiques, culturelles, sociales et éducatives entre le Royaume-Uni et le Québec peuvent amener certaines nuances. Comme mentionné précédemment, l’environnement de la classe a été peu étudié et des futures recherches pourraient nuancer ce qui est avancé ici.
Référence complète :
Barrett, P., Davies, F., Zhang, Y., & Barrett, L. (2015). The impact of classroom design on pupils’ learning: Final results of a holistic, multi-level analysis. Building and Environment, 89, 118–133. https://doi.org/10.1016/j.buildenv.2015.02.013